Depuis de nombreuses semaines, des milliers de panneaux de villes et de communes se sont retrouvés la tête à l’envers à travers toute la France. Cette action symbolique a pour but de dénoncer les aberrations de la politique agricole et les non-sens constatés au quotidien par les agriculteurs.
Les producteurs français doivent aujourd’hui s’adapter à des évolutions fortes en termes de respect du bien-être animal, de l’environnement et des changements sociétaux. Mais auront-ils le temps et l’énergie pour le faire ? Nos équipes d’Heliantis énergies ont voulu partager pourquoi les agriculteurs français en ont assez de « marcher sur la tête ».
Réduction des rejets de CO2 mais porte ouverte aux importations…
L’agriculture française est accusée d’être responsable d’une grande partie des rejets nationaux des gaz à effet de serre. Il est donc demandé aux éleveurs de réduire de 20% leurs émissions, alors qu’en parallèle le gouvernement signe des contrats pour importer de la viande du Brésil, d’Argentine ou de Nouvelle-Zélande. Il est très facile de comprendre l’illogisme de cette situation et que le bilan carbone, hormis le fait qu’il ne soit plus produit sur le sol français, est catastrophique…
Alors que les discours prônant la souveraineté alimentaire française sont légion, il est quasiment impossible actuellement en France de monter ou d’agrandir un élevage sans faire face à une intense levée de bouclier et à la création de plusieurs associations d’opposition.
Parmi les nombreux exemples de ce type, on peut citer la production d’œufs. De nombreux élevages français en code 3 ont été contraints de fermer leurs portes ces dernières années, entrainant une baisse significative de la production et même une sous-production. Mais les rayons des magasins devant rester pleins, les négociants n’ont pas hésité à importer des œufs détaxés ukrainiens, polonais ou espagnols produits dans des élevages industriels et dans des conditions nettement moins maitrisées et contrôlées qu’en France. Ne valait-il mieux pas conserver les productions industrielles françaises, contrôlées et soumises à des cahiers des charges stricts ?
Des charges administratives de plus en plus lourdes
Les agriculteurs français sont de plus en plus détournés de leurs activités principales de production, par des obligations administratives toujours plus fortes et complexes. Malgré des niveaux d’étude de plus en plus élevés chez les exploitants agricoles, ils rencontrent de fréquentes difficultés pour comprendre et compléter les dossiers. Dans certains cas, même les organismes extérieurs auxquels ils peuvent faire appel, ont eux-mêmes des problèmes pour compléter les documents. L’agriculteur sera pourtant bien facturé de la prestation, qu’elle soit bien faite ou pas, et tout en ne voyant pas son revenu amélioré...
Des irrégularités, des retards et des aides qui disparaissent
Tous les agriculteurs français, qu’ils soient engagés en agriculture conventionnelle ou biologique, ne peuvent malheureusement pas actuellement se passer des aides financières. Elles leur sont indispensables pour préserver leur rentabilité et leur revenu. Depuis quelques temps, il est pourtant très fréquent de constater des retards et des illogismes dans les versements de celles-ci.
A titre d’exemple, au printemps 2023, le gouvernement a encouragé les agriculteurs à signer des engagements de mise en place de mesures agro-environnementales (MAE) en faveur d’un verdissement des pratiques. Dans la réalité, le versement des aides étant soumis à résultat, les exploitants ont dû engager rapidement des modifications significatives et coûteuses dans leur façon de travailler, en augmentant par exemple les surfaces de prairies. Les évolutions réalisées ont dû être validées par des organismes compétents, moyennant un audit facturé 1000 € à l’exploitant. Quelle ne fut donc pas leur déception, pour ne pas dire colère, quand à l’automne le gouvernement a annoncé avoir sous-estimé l’enveloppe et qu’ils ne toucheront finalement pas les sommes prévues, voire rien du tout !
La sensible question des prairies
Les prairies sont reconnues pour être d’excellentes sources de captage du CO2 et un filtre pour l’eau permettant de préserver les nappes phréatiques. Leur mise en place et leur préservation font donc partie à part entière des enjeux actuels. Comment expliquer alors les points suivants :
- Une prairie temporaire devient obligatoirement permanente au bout de 5 ans. Les contraintes pesant sur les prairies permanentes étant beaucoup plus lourdes, les agriculteurs n’ont pas d’autre choix que de labourer avant ces 5 ans leurs prairies temporaires, même encore exploitables, s’ils veulent être certains de pouvoir en conserver l’utilisation !
- Toujours dans l’objectif de verdissement de l’agriculture, les exploitants sont encouragés à semer de plus en plus de prairies. Sauf que si la surface totale de prairies de l’exploitation dépasse un certain pourcentage de sa SAU, les aides ne sont pas versées pour non-respect du cahier des charges. L’administration demande même à l’agriculteur de détruire les prairies en trop, relâchant par la même occasion tout le carbone stocké dedans…
- Les agriculteurs sont tenus de respecter des distances réglementaires d’éloignement des épandages des cours d’eau, afin d’éviter toute pollution par ruissellement. Mais si un cours d’eau avec du débit n’apparait pas sur les cartes IGN, vous n’avez aucune obligation. Par contre, un fossé présent sur cette même carte mais dans lequel, il n’a jamais été vu la moindre goutte d’eau, doit lui être préservé des épandages trop proches, sous peine de sanctions financières...
Agriculteurs ou producteurs d’énergie ?
De plus en plus d’agriculteurs se détournent des productions végétales ou animales pour développer des activités secondaires comme l’agrivoltaïsme. Rien de surprenant à ces situations, quand on sait que ces activités peuvent représenter jusqu’à 80% du chiffre d’affaires des exploitations productrices d’énergie. Il ne faut pas oublier mais souligner que l’engagement des agriculteurs dans ce sens est aussi une réponse forte aux demandes environnementales actuelles, ainsi qu’à l’accroissement des besoins de production énergétique.
La visibilité de revenu sur 25 ans offerte par l’agrivoltaïsme, alors qu’en parallèle les agriculteurs ne connaissent le prix de vente de leur produit qu’une fois les récoltes, la traite ou la production livrée et vendue, il n’est donc pas surprenant de les voir chercher des solutions complémentaires à leur activité agricole pour garantir la pérennité de leurs entreprises. L’équilibre ne pourra être rétabli que lorsque les productions alimentaires seront rémunératrices pour les producteurs.
Un accompagnement primordial
Les points cités ci-dessus font partie d’une liste malheureusement non exhaustive d’exemples de règles et d’obligations totalement déconnectées de la réalité du terrain et auxquelles les exploitants doivent faire face au quotidien.
Il est alors plutôt facile de comprendre le désarroi des agriculteurs français ayant entrainé la mise en place de ces actions. Les récentes manifestations observées dans les pays voisins européens ne font qu’accentuer et confirmer ce que nos agriculteurs dénoncent depuis plusieurs semaines.
Dans ce contexte, il est primordial d’avancer avec nos agriculteurs pour faire face aux évolutions. Chez Heliantis énergies, nous croyons en l’indispensable rôle joué par nos exploitants agricoles comme acteurs de la transition énergétique. C’est pourquoi nous nous engageons à les accompagner dans la réalisation de leurs projets, dans le respect de leurs envies et en conciliant enjeux agricoles et enjeux environnementaux.